(…) L’écran vous impose son ordre – ordre politique, ordre économique, ordre de la consommation et des idées reçues. Ordre de ce qu’il faut avoir vu, de ce qu’il faut savoir, de ce qu’il faut admirer, de ce qu’il faut révérer. Faites l’inverse, comme Combas : confondez sciemment écriture et peinture, perturbez gravement la première par la seconde et réciproquement. Qu’obtenez-vous ? De la liberté pour les yeux et l’esprit, cette liberté qui n’existe qu’à la première personne. « Moi le roi du pinceau déconneur… » Rébellion.

VI

Subversions, sans en avoir l’air

Brève synthèse : que ce soit en démultipliant les types de dessin, en s’inventant une langue personnelle ou en réunissant écriture et peinture, Combas s’écarte des usages de notre époque et les fait crouler. Il renoue avec le primitivisme, du côté du burlesque et de la caricature. Il fait surgir des éléments décoratifs. Il retrouve l’art des cryptographies et des figures dissimulées dans la trame de la peinture. Il joue avec un argot poétique singulier. Il injecte de la couleur dans ses phrases et des phrases dans ses toiles. Tout cela est cohérent et les références qui viennent à l’esprit le sont aussi : la préhistoire, les « primitifs », l’art brut  et celui des internés, la caricature, la chanson, la blague, les enfants. Cela suffirait à montrer combien Combas est incongru. A lui seul, un carnaval.

Mais qu’est-ce que le carnaval ? Le moment où les hiérarchies officielles s’effondrent, où les puissants deviennent ridicules et les fous les seuls sages respectés. Le moment des inversions, des négations, de la dérision et de l’extravagance. On en dirait autant de Combas : son dispositif artistique et ses sous-entendus ne peuvent être séparés de ce qui se voit et se lit dans ses œuvres – et qui est de l’ordre de la subversion, de l’anarchie, du sacrilège. Le journal intime qu’il tient ne peut être que celui d’un irrespectueux, d’un railleur, d’un sceptique, d’un bougre qui ne respecte rien. Ni les réputations, ni les valeurs, ni les bonnes mœurs. Avec lui, les « pieds nickelés » entrent dans l’atelier ou le musée, en compagnie de Popeye, du capitaine Haddock, des « copains » de Brassens et du Père Peinard : une bande de ravageurs qui ne s’embarrassent pas précautions.

(…)

Philippe DAGEN ( extrait de texte préface à la monographie COMBAS )

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